Gouverner dans un monde fragmenté : ce que les PDG et les conseils doivent anticiper en 2025
- Knowledge @ Alides
- 11 avr.
- 3 min de lecture
La stratégie à l'ère du chaos organisé
L'année 2025 s'est ouverte sur une reconfiguration brutale de l'ordre économique mondial. Entre la relance des guerres commerciales par les États-Unis, les contre-mesures chinoises, et l'impuissance réglementaire de l'Union européenne, un nouveau cycle s'impose : celui d'une économie de blocs, instable, stratégique, dominée par les logiques de puissance.
Dans ce contexte, les conseils d'administration ne peuvent plus se contenter d'être des vigies financières. Ils deviennent des organes de stratégie globale, devant articuler souveraineté industrielle, sécurité numérique, exposition monétaire, compétitivité réglementaire et anticipation actionnariale.
Ce que nous vivons n'est pas une crise temporaire, mais un basculement systémique. Et les PDG avisés le savent : gouverner aujourd'hui, c'est anticiper les fractures de demain.
La frise ci-dessous illustre la densité inédite des chocs géopolitiques de ce début d’année.

Décryptage : Un capitalisme fractal, sous tension géopolitique constante
Les dernières semaines ont illustré cette métamorphose :
Trump 2.0 impose des droits de douane de 145 % sur les produits chinois et introduit des licences à l'export même vers des alliés stratégiques. L'Amérique verrouille sa base industrielle.
Pékin contre-attaque en restreignant l'exportation de métaux critiques (gallium, germanium), vitaux pour les technologies européennes.
Les cyberattaques déclarées, reconnues à demi-mot par la Chine, désignent les infrastructures civiles comme nouveau front du conflit.
Les marchés vacillent : l'or atteint 3 150 $/once, les bourses corrigent de 3 à 5 %, le dollar perd en attractivité.
L'Europe hésite : entre la posture commerciale allemande et l'appel français à la réciprocité, Bruxelles reste divisée.
La géopolitique n'est plus un bruit de fond : c'est la nouvelle variable-clé de la rentabilité des actifs et de la sécurité des opérations.
Conséquences stratégiques pour les conseils et les PDG
1. Repenser l'exposition géographique des actifs
Les chaînes d'approvisionnement doivent être cartographiées non seulement en fonction des coûts et compétences, mais aussi selon des critères de risque politique, de souveraineté réglementaire et de stabilité juridique. Un modèle trop dépendant d'une zone (Asie, Moyen-Orient, Amérique latine) peut être fragilisé en quelques semaines.

La matrice ci-dessus permet aux conseils d’administration de positionner leurs zones d’activité selon leur rentabilité et leur exposition géopolitique.
2. Faire de la cybersécurité un actif stratégique
Les attaques ciblent désormais les ports, les aéroports, les infrastructures hydrauliques et même es infrastructures civiles les plus sensibles dans plusieurs pays, y compris en Afrique du Nord (CNSS au Maroc).
Le budget cyber n'est plus une ligne IT : c'est une assurance opérationnelle, un levier de valorisation, et un argument pour les assureurs comme pour les investisseurs.
3. Intégrer les fluctuations monétaires dans la gouvernance financière
Le recul du dollar comme référence unique amène à diversifier les devises de référence, mais aussi les lieux de financement, les sièges fiscaux et les modèles de transfert de cash.
4. Identifier les futurs standards industriels "OTAN-compatibles"
Un "OTAN industriel" informel émerge sur les chaînes critiques. Être intégré à ces écosystèmes sécurisés exigera des conformités accrues (cyber, traçabilité, compliance) mais ouvrira l'accès à des financements et à des marchés préservés.
5. Anticiper les recompositions actionnariales
Dans ce contexte de volatilité accrue, des fonds activistes peuvent chercher à imposer des recentrages d'activité. Les conseils doivent préparer des "narratifs de résilience" à opposer à une logique purement opportuniste.
6. Adapter la stratégie RH à la nouvelle carte du talent mondial
La restriction des flux étudiants chinois aux États-Unis ou les tensions sur les visas technologiques remodèlent les gisements de compétences disponibles. Il faudra identifier de nouveaux hubs de formation et de recrutement dans les zones stables.

תגובות