top of page

Quand les dirigeants n’osent plus dire non

  • Photo du rédacteur: Knowledge @ Alides
    Knowledge @ Alides
  • 22 avr.
  • 3 min de lecture

Comment continuer à prôner l’innovation quand chaque décision stratégique est verrouillée par la conformité ? Nombre de dirigeants vivent aujourd’hui cette fracture silencieuse entre leurs convictions profondes et la ligne officielle de l’entreprise



Réfléchir avant de décider, douter avant d’agir. Chez de nombreux dirigeants, la lucidité n’est pas un luxe — c’est une solitude.
Dans un environnement professionnel saturé d’injonctions paradoxales – croissance accélérée mais sobriété climatique, inclusion proclamée mais contrôles renforcés, autonomie valorisée mais gouvernance centralisée – un malaise discret mais profond s’installe chez de nombreux cadres dirigeants. Ce malaise ne se traduit pas immédiatement par des conflits ouverts ou des ruptures visibles. Il prend racine plus en profondeur : dans la dissonance cognitive.

Phénomène bien documenté en psychologie sociale, la dissonance cognitive désigne le trouble intérieur ressenti lorsqu’un individu est confronté à des valeurs, des décisions ou des comportements incompatibles avec ses convictions profondes. Dans le contexte actuel, elle devient un indicateur critique de fragilité managériale et culturelle au sein des organisations.

 

Décryptage : les signaux faibles d’une crise de sens


Le retour de l’autorité politique dans les sphères économiques et sociales – comme en témoignent les tensions autour des universités américaines ou les pressions exercées sur les grands cabinets d’avocats – participe à cette instabilité éthique. Nombre de dirigeants se retrouvent pris entre fidélité à leurs valeurs et loyauté à une ligne de gouvernance imposée.

Plus insidieusement, ce sont les contradictions internes des entreprises elles-mêmes qui nourrissent le malaise. On demande aux leaders :
  • de favoriser l’engagement des collaborateurs tout en réduisant leurs marges de liberté ;
  • de promouvoir la diversité mais de standardiser les processus à outrance ;
  • d’innover en permanence, tout en garantissant la conformité réglementaire totale.

Se regarder en face. Quand le costume du dirigeant ne suffit plus à masquer les tensions internes, le véritable leadership commence.
Cette tension permanente génère trois types de réactions observables :
  • Le retrait actif : des dirigeants qui se replient, adoptent une posture défensive, s’abstiennent d’initiatives et deviennent silencieusement absents.
  • L’alignement cynique : certains choisissent de "jouer le jeu" en adoptant un double discours, maintenant une façade d’adhésion tout en se désengageant intérieurement.

    Trois issues silencieuses à la dissonance cognitive chez les dirigeants : 🔵 Le retrait – l’effacement actif. 🟤 Le cynisme – l’alignement de façade. 🔺 La rupture – la sortie discrète mais décisive.  Une typologie qui en dit long sur les signaux faibles à détecter au sommet.
    Une typologie qui en dit long sur les signaux faibles à détecter au sommet.

  • La rupture discrète : enfin, une part croissante de dirigeants quitte les structures, souvent sans bruit, invoquant des "raisons personnelles" qui cachent un profond désalignement de valeurs.

Implications pour les dirigeants et les conseils d’administration


Ce phénomène de dissonance cognitive managériale n’est pas seulement un sujet de santé mentale ou de culture d’entreprise. Il a des implications stratégiques directes :
  • Sur la performance collective : une organisation dirigée par des leaders désalignés perd en énergie, en clarté stratégique, en cohésion interne.

La chaise vide n’est pas toujours le signe d’un départ annoncé. Dans les conseils et comex, certaines ruptures s’opèrent sans bruit – mais laissent des traces durables.
  • Sur la rétention des talents clés : les profils à haut potentiel, très attentifs à la congruence entre discours et réalité, fuient les environnements dissonants.
  • Sur la réputation et la gouvernance : un dirigeant qui démissionne pour raisons éthiques fragilise la marque employeur autant que la crédibilité du board.
Les comités de nomination, les investisseurs et les actionnaires familiaux doivent être particulièrement attentifs à ces signaux faibles. Une culture organisationnelle qui tolère, voire encourage, les dissonances prolongées, crée un terrain propice aux crises de réputation et aux départs inattendus.

Vers un leadership d’alignement

Dans ce contexte, le rôle des dirigeants évolue : il ne s’agit plus seulement de produire des résultats, mais de porter une ligne cohérente entre la vision de l’entreprise, ses pratiques et ses discours. Cela nécessite :
  • un dialogue stratégique renforcé entre dirigeants et actionnaires sur les dilemmes éthiques rencontrés ;
  • des dispositifs de feedback sincères (entretiens 360, diagnostics culturels, dispositifs de parole protégée) ;
  • et un accompagnement des leaders dans leur capacité à arbitrer, à s’autoriser des zones de doute, à oser dire non quand c’est nécessaire.
Chez Alides, membre d'ECI Group,nous observons que les dirigeants les plus impactants aujourd’hui sont ceux qui savent conjuguer lucidité éthique et courage d’arbitrage. Ce sont eux qui restaurent la confiance, nourrissent l’engagement et assurent, à terme, la résilience stratégique de leur organisation.

Dans un environnement saturé d’injonctions contradictoires, le rôle du dirigeant ne peut plus se limiter à une gestion efficace des opérations ou à la poursuite d’objectifs chiffrés. Il devient celui qui garantit la cohérence entre finalité, action et posture.

Cela suppose non seulement du courage éthique, mais aussi un travail exigeant sur soi, sur ses décisions et sur sa place dans l’organisation.

C’est dans cet esprit que certaines entreprises, conseils d’administration ou actionnaires familiaux choisissent aujourd’hui d’investir dans une approche structurée d’assessment et de développement du leadership, non comme levier RH, mais comme mécanisme de résilience stratégique.
Identifier les signaux faibles, écouter les dissonances, soutenir les arbitrages les plus lucides : c’est ainsi que se bâtit, au sommet, la solidité culturelle d’une organisation.

Commentaires


Logo du réseau international ECI Group, dont Alides est membre
Icône invitant à suivre Alides sur LinkedIn pour découvrir ses publications et offres
Logo de l'AESC – Association of Executive Search and Leadership Consultants, dont Alides est membre

©2025 par ALIDES

bottom of page